QUAND : Septembre 2018 - Mai 2019

RÔLE : Recherche, écriture & design

 

Fruit d’un travail de 8 mois de recherche, nous nous sommes intéressées à l'amour, à Internet et à la relation que ces deux entités entretiennent. Lorsque nous avons décidé de traiter ce sujet de recherche, nous nous sommes rendues compte que nous n'avions que nos propres intuitions et convictions et très peu de données tangibles et scientifiques. Nous nous sommes attachées à traiter ce sujet éminament subjectif avec le plus d'objectivité possible. 

 

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UNE PREMIÈRE APPROCHE

Avec cette idée en tête de proposer un mémoire de recherche autour de l’amour et de ce qu’y ont apporté Internet et le numérique, nous avons dès le début commencé à nous interroger sur ce que tout cela pouvait englober. Nous avons établi différentes hypothèses et écrit quelques pistes de réflexion.

Comment place-t-on l’amour dans la société ? À quoi répondent les plateformes de rencontres ? Comment communique-t-on avec ces personnes qui nous plaisent ? Quelle place occupent les réseaux sociaux dans notre manière de dialoguer ?

Nous avons tenté de répondre à nos différentes questions et ces réponses, dénuées de validation de la part d’études et d’expert, nous ont permis de dégager la problématique principale sur laquelle baser notre travail d’investigation.

ProblematiqueProblematique

PROBLÈMATIQUE & MÉTHODOLOGIE

Comment le digital a-t-il modifié notre manière d'aimer ?

Par digital, il s’agit d’une facilité de langage qui englobe aussi bien Internet que les technologies qui l’entourent. Quand on parle de modifier, on questionne notre rapport aux évolutions que le digital a impliqué dans la société et comment ces objets du quotidien, le smartphone ou l’ordinateur, ont-il pu avoir une incidence sur nos relations. Quand à ce qu’on englobe dans “manière d’aimer” c’est une façon pour nous de délimiter le propos de nos recherches. Ici, nous nous sommes intéressées uniquement aux relations amoureuses. 

Notre méthodologie de travail

Recherche de ressources : articles, études sociologiques, oeuvres littéraires, conférences, podcasts,...

Étude quantitative : 200 répondants nous ont donné leur vision de l'amour, leur avis sur les plateformes de rencontres et leurs critères de choix sur ces plateformes

Étude qualitative : interview en 1to1 avec 15 personnes H/F de 10 à 60 ans qui nous ont confié une partie de leur intimité amoureuse

Interview de cinq experts du milieu : 

  1. Charles Bail, co-fondateur de Fruitz
  2. Brenda Boukris, fondatrice d'Attitude Séduction
  3. Éric Chollet, product owner chez Affiny (Meetic)
  4. Antoine Géraud, co-fondateur d'Abricot
  5. Fred "Beasty" Tourrou, UX/UI Designer chez Once

LE PLAN D'ATTAQUE

Dans un premier temps, nous nous sommes intéressées à l'Amour dans sa définition la plus pure à travers différents prismes afin d'en dégager, ou non, des évolutions à travers les âges.

Nous avons ensuite étudié le moment où Internet s'est immiscé dans notre quotidien puis dans notre intimité pour déceler de potentielles modifications dans nos relations amoureuses avec l'avènement des plateformes de rencontres et des réseaux sociaux notamment. 

Puis, on s'est intéressées à l'envers du décors, comment les plateformes de rencontres sont-elles conçues, comment leurs fondateurs réussisent à en faire un business, ce qui nous a permis de dégager quelques prédictions sur l'avenir de la rencontre en ligne. 

Tout au long de notre étude, nous nous sommes confrontées à nos biais de croyance, nous nous sommes attelées à déconstruire les lieux communs, les vérités générales et les légendes urbaines pour en révéler une vérité scientifique.  

"L'ÉVOLUTION DE LA SOCIÉTÉ A PROVOQUÉ DE GRANDS CHANGEMENTS DANS LA VISION DE L'AMOUR"

Notre toute première hypothèse s’est donc basée sur l’image que nous nous faisions de l’amour. Pour vérifier ou invalider cette hypothèse, nous avons étudié des œuvres romantiques des siècles passés, nous avons lu des études sur les sociétés passées et actuelles et nous avons interrogé différentes générations sur ce que représentait l’amour pour elles.

Tout ce que ces gens disent, tout ce que nos recherches nous ont permis d’apprendre… ont validé l’idée selon laquelle la vision de l’amour est toujours la même. On l’imagine possessive et passionnée, à l’image de ce qu’en offre la culture et les médias qui l’idéalisent.

Cela étant si la vision de l’amour reste similaire au gré des âges, c’est les comportements qui semblent avoir changés. L’amour se vit plus fort, il s’exprime aussi plus fort aux travers des réseaux sociaux notamment. La société l’a décomplexé et permet à qui le veut de le vivre comme bon lui semble.

C’est cette société, accompagnée par Internet, les réseaux sociaux, les smartphones, qui semble aujourd’hui capable de nous laisser dialoguer avec la personne qui nous plaît, ou même de la rencontrer.

ÉCOUTONS-LES NOUS PARLER D'AMOUR

"INTERNET PERMET DE RENCONTRER CES PERSONNES QUE NOUS N'AURIONS JAMAIS RENCONTRÉ SINON."

Rencontrer une personne qui comptera pour nous devient alors une autre hypothèse sur laquelle nous avons appuyé le début de notre deuxième partie. Internet, à sa manière, semble être capable de rassembler des personnes qui ne se seraient jamais rencontrées sinon.

Pour en découvrir plus sur ce sujet, nous avons interrogé des gens qui se sont rencontrés grâce à cet outil. Ces personnes ont pris le temps de nous expliquer leur rencontre et les manières parfois inédites qu’ils ont eu pour le faire. Alexis, par exemple, nous a raconté sa toute première interaction avec celle qu’il aime sur Twitter.

Viennent alors les plateformes de rencontres qu’on compte par millier rien qu’en France. Pour Affiny, une marque de Meetic, la promesse est la suivante : Rencontrez votre moitié, pas votre double. C’est son PO, Eric Chollet, qui nous en parle et nous raconte qu’être identique ne fait pas de nous des êtres compatibles. Et la complémentarité, c’est l’équilibre dans un couple.

Internet permet de trouver des personnes hors de nos cercles sociaux habituels, comme on le remarque dans une étude américaine qui nous apprend qu’il y a eu une augmentation des mariages multiethniques grâce aux sites de rencontres. Cependant, Internet a été incapable de briser une autre barrière : celle de l’homogamie sociale.

Les études semblent s’accorder sur le fait qu’on aura beau être ouvert à tout type de rencontre, les personnes qui s’aiment font peu ou proue partie d’une même classe sociale. Les gens se cloisonnent d’eux-mêmes à des typologies qui leur sont propre et même Internet n’a pas été capable d’y mettre un terme.

ÉCOUTONS ALEXIS NOUS PARLER DE SA RENCONTRE

"INTERNET DÉVELOPPE UNE INTIMITÉ À DEUX VITESSES ENTRE LES PERSONNES QUI DIALOGUENT."

L’écran qui nous cache peut avoir tendance à mitiger notre rapport avec l’autre. Il y a deux vitesses dans une relation où les écrans sont prédominants.

Chez tout ceux que nous avons interrogé, beaucoup nous ont révélé avoir cette tendance à communiquer sans discontinuer par le biais d'une messagerie instantanée. Cette communication ultra-rapide permet une intimité plus rapide. On apprend de l’autre, on découvre ses instants de vie, on partage sa culture, son humour… Internet et le digital, accélèrent les échanges et ont créé une nouvelle sphère d'intimité au sein d'un couple. Dorénavant, on s'apprivoise par messages interposés, puis on se rencontre, la séduction aura, elle, déjà commencée.

Mais cette accélération, pour Pascal Couderc, auteur de L'amour au coin de l'écran, n’empêche pas d’être attentif à l’image que l’on dégage. Se montrer sous son meilleur jour devient impératif pour qu’on ne reflète que sa plus belle image. Nous sommes sans arrêt amenés à maîtriser nos vies, celle de la vie réelle et celle sur Internet.

"LES ALGORITHMES DE MATCHING SE BASENT SUR NOTRE GÉOLOCALISATION ET NOS CENTRES D'INTÉRÊT."

Notre image virtuelle nous importe énormément mais nous ne maîtrisons pas tout, notamment sur les plateformes de rencontres. Au commencement de notre recherche, nous pensions un peu naïvement que les algorithmes de matching décidaient des profils qu'elles allaient nous présenter en fonction de critères simples comme la proximité géographique ou les points communs que nous partagions avec l'autre. Nous avons découvert que nos profils et nos intéractions avec les autres sont scrupuleusement analysés et les critères sont beaucoup plus complexes qu'il n'y paraît. 

Nous avons, entre autre, découvert que les mots que nous employons sont analysés en fonction de leur compléxité et du nombre de syllabes par mot afin d'établir notre niveau d'études. Seulement, l'algorithme ne va pas proposer les mêmes personnes en fonction du sexe de l'utilisateur. Par exemple, un homme avec un niveau d'études considéré comme élevé, se verra proposer des femmes avec un niveau d'études inférieur à lui. 

Si nous étions très surprises par cette découverte, nous avons ensuite corrélé les données que nous avions récolté grâce à notre étude quantitave sur 200 répondants. Nous demandions aux répondants de classer différents critères dans le choix de leur partenaire en fonction de leur niveau d'importance. Nous avons analysé ces résultats en fonction du sexe des répondants. Si pour les hommes et femmes, l'humour est le premier critère de choix, le deuxième critère diffère en fonction du sexe des répondants. Pour les hommes, le deuxième critère qu'ils considérent comme très important sera la proximité géographique, chez les femmes ça sera le niveau d'études du partenaire. 

On est en mesure de se demander si ce sont les algorithmes de matching qui influencent nos critères de choix ou s'ils reproduisent uniquement des schémas de société ? 

 

"DEMAIN, UN ALGORITHME POURRA TROUVER NOTRE ÂME SOEUR."

Les algorithmes deviennent de plus en plus performants et sont aujourd'hui capables de dresser le profil psychologique d'un utilisateur. L'université de Cambridge a mis en ligne un algorithme en version bêta, Apply Magic Sauce, capable à partir de 50 likes anonymisés de notre profil Facebook de déterminer plusieurs traits de notre personnalité. L'algorithme est par exemple capable de prédire notre sexe, notre âge, notre situation amoureuse, notre orientation sexuelle et nos convictions politiques. 

Nos données personnelles sont analysées et peuvent permettre de prédire certains de nos choix voire de les influencer. Certaines entreprises en ont fait leur coeur de métier comme Cambridge Analytica. Cette entreprise avait fait scandale lors des éléctions américaines en 2016, elle était accusée d'avoir influencé des milliers d'utilisateurs dans leur scrutin politique. Cambridge Analytica s'adressait à des responsables de campagne politique mais également à des sociétés commerciales et leurs promettait d'influencer le comportement d'utilisateurs pour les convertir en client.

Dans cette mesure, il est tout à fait possible que, demain, un algorithme nous propose de rencontrer notre âme soeur. Reste à savoir si notre choix ne sera pas influencé. Sans algorithme, aurions-nous fait le même choix ?

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